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Petite histoire d’une mère immigrante qui ne voulait plus vivre la solitude

Pas la peine de vous sortir des données statistiques ou les quelconques études sociologiques menées ces dernières années par des collègues universitaires émérites (certes), car elles ne seront pas forcément utiles pour ma prise de parole aujourd’hui. Je vous vais parler aujourd’hui comme d’habitude avec mon cœur.

L’immigration pour la plupart de celles et de ceux qui en sont concerné.es est le cadeau d’une vie. Un renouveau, un reset pour essayer d’atteindre enfin un idéal de vie à la hauteur de nos espérances. Cette exode est mûrement préparée, choisie, rêvée et projetée.

On quitte tout parce qu’on sait que chez nous ce n’est plus fait pour nous. On est rendu ailleurs, on ne s’imagine pas évoluer dans une société morose, qui fait des discriminations entre les citoyens, ou tout simplement dans laquelle on n’est pas en sécurité.

Alors, on part quand on nous en offre l’occasion. On s’en va avec la personne qui partage notre vie, avec des enfants certaines fois; ou comme moi, seule. Il y a quelques temps de ça.

On arrive dans notre nouveau pays, on s’installe, on étudie, on trouve une job, l’âme sœur. On se marie et on fait des enfants. Oui, de beaux enfants métissés que tu offres au Québec et au Canada comme cadeau en guise de son hospitalité et en remerciement de t’avoir offert la dignité de t’intégrer comme un individu à part entière, sans distinction attribuable à des critères arbitraires. Juste pour ce que tu es.

Alors, tu tombes enceinte. Ta crevette pousse dans ton ventre. Tu n’es pas en grande forme, les nausées, la tristesse, la déprime. Puis tu te rends compte que ta mère n’est pas là pour te soutenir. Tu mourrais pour manger ses msemmens (crêpes marocaines), mais tu restes sur ton envie toute ta grossesse. Tu es à quatre pattes pour accoucher naturellement sans épidural, tu cries « Maman » pendant que tu souffres, et elle n’est pas là. Ton petit bébé dans les bras, et personne ne te visite à l’hôpital. Tu allaites, ton bout de chou fait ses premiers pas. Tu es juste toi et ton conjoint à être témoin de ce petit être qui grandit.

Être immigrante et être mère, c’est vivre sa maternité seule, loin des siens. Et c’est juste trop dur. Un sacrifice que tu acceptes de faire pour offrir un avenir à tes enfants. C’est souvent la meilleure solution, à vrai dire.

À la naissance de ma deuxième fille, j’ai décidé que j’arrêtais là l’isolement. Je n’ai pas ma mère, mon frère et ma sœur avec moi, c’est un fait, mais je peux me créer de nouvelles amitiés, rencontrer d’autres mamans et voir du monde. Je ne pouvais plus rester seule, c’était devenu une question de santé mentale. Alors, j’ai commencé à fréquenter la Halte allaitement au CLSC de mon quartier, je me suis faite une première amie maman dont le bébé était né presque au même moment que ma fille. Je me suis inscrite à un cours de Maman-Danse, j’ai rencontré d’autres mères. J’ai renoué avec mes vieilles amies, j’ai accepté les invitations. Je me suis faite de nouvelles amies, presque cosmiques tellement les énergies étaient jumelles!

Et j’ai compensé. Oui, compensé le fait de ne pas avoir ma famille biologique proche de moi par l’amitié, l’entourage, par une communauté dans laquelle mes filles trouvent leur repère. L’école, la piscine, les voisins, les copains, les implications, même notre Boston terrier Charlotte en fait partie! C’est sûr que je ne pourrais jamais déposer mes filles chez ma mère pour qu’elle me les garde, mais j’ai de supers belles gardiennes sur qui compter (et pas mal de mes étudiantes qui accepteraient de me les garder aussi si je suis mal prise!).

J’ai offert le cadeau d’une communauté tricotée à mon image à mes filles. Elle est arc-en-ciel, elle a les cheveux frisés et elle sent la fleur d’oranger tellement elle est belle. Mes enfants seront à leur tour chanceuse, car leur père et moi serons là pour elles. Je leur tiendrai la main quand elles deviendront à leur tour maman, je ferai des msemmens, du gardiennage, mes yeux dégusteront toutes les minutes privilégiées partagées avec elles. Ma patience et mes sacrifices n’auront pas servi à rien. Ma solitude, non plus.

À la suite de cet texte, n’hésitez pas à partager votre témoignage et à me poser des questions, je vous répondrai dans la mesure du possible. Merci de m’avoir lu.

Myriam-MayaSanaa

  • Siham dit :

    Très beau texte! Ma mère est venue à 1ere grossesse mais pas à la deuxième, et j’ai mal vécu cela.
    Des fois j’envie les québécois parce qu’ils sont parmi les leurs…

  • Nada aziz dit :

    Bravo ma belle pour ton courage et sache que t’as fait le bon choix et j’aimerai aussi réussir à le faire un jour … je t’aime bcp ma myriam

  • Dounia dit :

    Me he visto reflejada en este artículo, Lo estaba leyendo y me emocioné porque pasé por lo mismo, pase el embarazo sola con muchas ganas de comer platos de mi madre o un consuelo de ella. Pero después del nacimiento de Noa empecé a conocer gente otras mamis en mi misma situación y se mejore la situación.
    Te felicito por este post Cariño
    Marrakchia.mom

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